
La région des Grands Lacs est une zone stratégique où s’entremêlent des intérêts politiques, économiques et sécuritaires. Au cœur des tensions, l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) est depuis des décennies le théâtre de violences alimentées par des groupes armés. Deux figures clés émergent dans ce contexte : le Président burundais Évariste Ndayishimiye, qui prône la stabilité et la coopération régionale, et le Président rwandais Paul Kagame, accusé de soutenir la rébellion du M23 pour des raisons économiques et stratégiques. Tandis que l’un cherche à pacifier la région et à renforcer l’intégration africaine, l’autre semble isolé sur la scène internationale en raison de ses actions controversées.
Évariste Ndayishimiye : Un artisan de la paix et un diplomate stratège.
Depuis son accession au pouvoir en 2020, Évariste Ndayishimiye a progressivement renforcé la position du Burundi sur la scène régionale et internationale. Contrairement à ses prédécesseurs, il a opté pour une politique extérieure plus ouverte et dynamique, axée sur le dialogue et la coopération. Face à l’instabilité persistante à l’Est de la RDC, il a pris une position claire : soutenir les Forces Armées de la RDC (FARDC) dans leur lutte contre les groupes rebelles, y compris le M23, accusé d’être soutenu par le Rwanda.
Son engagement en faveur de la paix ne s’arrête pas là. Il joue un rôle actif au sein de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) et de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL), des plateformes essentielles pour la résolution des conflits. En envoyant des troupes burundaises pour aider à sécuriser le Sud-Kivu, il prouve son engagement concret à mettre fin aux violences qui fragilisent la région.
D’un point de vue économique, cette position avantage le Burundi. En renforçant ses relations avec Kinshasa, Gitega bénéficie de nouveaux accords sécuritaires, notamment pour participer à la stabilité de la région de Kivu. Cette dynamique contraste avec celle du Rwanda, dont l’image internationale est de plus en plus ternie par les accusations de pillage des ressources congolaises.
L’engagement du Président Evariste Ndayishimiye en faveur de la stabilité en Afrique se manifeste à travers plusieurs initiatives notables :
- Leadership au sein de l’EAC : En tant que président en exercice de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC), le Président Ndayishimiye a joué un rôle clé dans l’organisation de sommets régionaux et a appelé à renforcer la gouvernance pour assurer la paix et la sécurité.
- Promotion de l’agriculture durable : Il a participé au Sommet de l’Union africaine sur l’agriculture à Kampala, insistant sur des systèmes agricoles performants pour le développement durable du continent.
- Engagement envers la jeunesse africaine : Il a accueilli le 3ᵉ Dialogue continental sur la jeunesse, la paix et la sécurité, impliquant plus de 800 jeunes de 30 pays africains.
- Soutien aux jeunes vivant avec un handicap : En tant que Champion de l’Union africaine pour l’Agenda Jeunesse, il a plaidé pour l’inclusion des jeunes handicapés dans les processus de paix.
- Participation aux sommets internationaux : Le Président Ndayishimiye a renforcé la diplomatie burundaise en participant à des sommets comme le Sommet États-Unis-Afrique et le Sommet Russie-Afrique.
Cette approche donne au Burundi une reconnaissance internationale croissante et des opportunités économiques en établissant des accords commerciaux et sécuritaires avec la RDC.
Paul Kagame : Une Stratégie de déstabilisation et un isolement croissant.
À l’opposé de Ndayishimiye, Kagame est de plus en plus perçu comme un acteur clé dans l’instabilité de l’Est de la RDC. Plusieurs rapports, dont ceux de l’ONU, attestent du soutien rwandais aux rebelles du M23, une milice qui terrorise les populations du Nord-Kivu et s’approprie des zones riches en minerais stratégiques tels que le coltan, l’or et le cobalt. L’objectif de Kigali semble clair : maintenir une emprise sur l’exploitation des ressources naturelles congolaises en utilisant le M23 comme bras armé.
Cependant, cette politique agressive commence à se retourner contre lui. De nombreux pays occidentaux, dont les États-Unis, la Belgique et la France, ont récemment condamné l’implication rwandaise dans la crise congolaise, menaçant même de revoir leur aide et coopération avec Kigali. Cette pression diplomatique, ajoutée aux sanctions économiques potentielles, isole de plus en plus le Rwanda sur la scène internationale.
En parallèle, alors que Kigali voit ses relations avec Kinshasa se détériorer, Gitega renforce son partenariat avec la RDC, obtenant ainsi un avantage diplomatique et économique. Tandis que le Burundi se présente comme un allié stable et respecté, le Rwanda risque de perdre en crédibilité et en influence à long terme.
Cette politique se traduit par des chiffres d’exportation troublants :
- En 2023, le Rwanda a exporté 2 700 tonnes de coltan, dépassant les 1 918 tonnes exportées par la RDC, pourtant réputée pour ses riches ressources minières.
- Les recettes d’exportation de minéraux du Rwanda ont atteint 1,1 milliard de dollars en 2023, en hausse de 43% par rapport à 2022.
- Le Rwanda a été classé premier exportateur mondial de coltan pour la cinquième fois en dix ans, alors qu’il dispose de peu de réserves minières propres.
Ces données alimentent les accusations de pillage des ressources congolaises, ce qui isole de plus en plus Kigali diplomatiquement. Les États-Unis, la Belgique et la France ont déjà critiqué l’implication du Rwanda, menaçant de réduire leur aide et de mettre en place des sanctions.
Un Tournant pour la Région des Grands Lacs.
L’opposition entre les stratégies de Ndayishimiye et Kagame pourrait redéfinir l’équilibre des forces en Afrique centrale. D’un côté, un président burundais qui mise sur la coopération régionale et la paix pour asseoir son leadership diplomatique et économique. De l’autre, un président rwandais dont la politique expansionniste semble de plus en plus contestée par la communauté internationale.
Si la tendance actuelle se poursuit, le Burundi pourrait émerger comme un acteur clé pour la stabilité et le développement économique de la région, au détriment du Rwanda, qui risque de s’enfoncer dans une spirale d’isolement. La RDC, quant à elle, devra continuer à naviguer entre ces influences pour restaurer sa souveraineté sur son propre territoire et mettre un terme à des décennies de violences.
Le conflit à l’Est de la RDC met en évidence deux visions opposées pour l’avenir de la région des Grands Lacs. Évariste Ndayishimiye incarne une approche diplomatique et économique axée sur la paix et l’intégration régionale, tandis que Paul Kagame s’appuie sur une stratégie de déstabilisation pour maintenir son emprise sur l’exploitation illégale des ressources congolaises.
Le Rwanda tire depuis des décennies des bénéfices économiques massifs du pillage des minerais congolais, notamment du coltan, du cobalt et de l’or, indispensables aux industries technologiques et minières mondiales. En soutenant le M23, Kagame cherche avant tout à contrôler les zones minières stratégiques de l’Est de la RDC, tout en fragilisant Kinshasa pour empêcher son autorité de s’affirmer sur ce territoire riche en ressources. Cette stratégie, bien que lucrative pour Kigali, commence à s’attirer de vives critiques internationales, mettant en péril la stabilité du Rwanda sur le long terme.
En revanche, Ndayishimiye adopte une stratégie gagnante, en consolidant les relations entre le Burundi et la RDC sur les plans diplomatique et économique. En se positionnant comme un allié de Kinshasa et un acteur clé de la stabilité régionale, il ouvre la voie à des partenariats commerciaux durables et à une reconnaissance internationale accrue. Cette approche pourrait permettre au Burundi de bénéficier, de manière légale et transparente, des opportunités économiques liées aux vastes ressources de la RDC, sans s’attirer les sanctions et l’isolement que connaît aujourd’hui le Rwanda.
Si la dynamique actuelle se poursuit, le Burundi pourrait devenir un acteur influent et respecté dans la région des Grands Lacs, tandis que le Rwanda de Kagame risque de s’enfoncer dans une spirale d’isolement diplomatique et de pressions économiques. À long terme, il est de plus en plus évident que la paix et la coopération sont les seules voies viables pour un développement économique durable en Afrique centrale.
Alors que le Burundi se forge une réputation d’allié fiable et stable, le Rwanda est confronté à des critiques croissantes et à la perspective de sanctions. L’avenir dépendra du choix entre la paix et l’exploitation des conflits. Le Burundi semble déjà engagé dans la bonne direction, alors que le Rwanda de Kagame devra réagir face à la pression internationale.
Dans cette bataille pour la stabilité régionale, le leadership responsable et diplomatique de Ndayishimiye pourrait bien s’imposer comme un modèle pour l’Afrique des Grands Lacs.
Par Bazikwankana Edmond