Burundi : Nshimirimana Adolphe, un général, un destin, une légende

De son enfance à Gishubi à son assassinat en 2015, le Lieutenant-Général Nshimirimana Adolphe a marqué l’histoire du Burundi

Gitega (Gishubi), 2/08/2025 – En ce jour de fête communale à Gishubi, les Barundi ont rendu hommage à l’un de leurs héros contemporains : le Lieutenant-Général Nshimirimana Adolphe, assassiné ce même jour par un missile tiré lors d’un attentat attribué à la « Croix et la Bannière ».

Né le 12 septembre 1964 à Gishubi, Nshimirimana Adolphe appartenait à ces grands muryango (familles) qui, sous Ingoma y’Uburundi, incarnaient la grandeur du pays. Sa jeunesse fut marquée par deux traumatismes historiques : la chute d’Ingoma y’Uburundi en 1966 et le génocide contre les Hutu en 1972[1][2]. Ces événements forgèrent en lui une résolution inflexible : ramener le Burundi à sa gloire passée.

Engagé très tôt dans le Front National de Libération (FNL), créé en 1983 dans les camps de réfugiés burundais en Tanzanie, branche armée du PALIPEHUTU de Gahutu Rémy. Dès 1994, après les massacres de Kamenge du mois de janvier 1994, il rejoignit en juin 1994 les Forces de Défense de la Démocratie (FDD), noyau militaire du CNDD, pour affronter l’armée du régime Buyoya. Pendant la Guerre Civile du Burundi  (1993-2003), il se distingua comme un stratège redoutable, défiant l’armée néocoloniale avec une témérité qui lui valut le respect de ses pairs.[3]

En 2003, après l’accord de cessez-le-feu, il fut le premier officier du CNDD-FDD à entrer triomphalement dans Bujumbura, acclamé par des milliers de Barundi en liesse. Une scène comparée, dans les mémoires, à la libération de Paris en 1945.

De 2005 à 2015, cet homme marié et aimé de tous devint une figure populaire. Son QG, un bar de Kamenge, était connu pour ses rires et ses bouteilles partagées – des moments de répit dans une vie de combat.

En mai 2015, il déjoua le coup d’État fomenté par la « Croix et la Bannière« [4], sauvant ainsi la transition démocratique. Mais le 2 août 2015, un missile l’a fauché. Aujourd’hui, un boulevard porte son nom, sur décision de feu Nkurunziza Pierre – autre martyr de cette lutte sans fin.

Son héritage ? Un Burundi debout, malgré les guerres imposées par les héritiers de la colonialité.

Références :

[1] Nahimana Karolero Pascal, Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi, Bruxelles, Génération Afrique, 2024.
[2] Kubwayo Félix, La lente reconnaissance du génocide de 1972 contre les Hutu du Burundi : Les faits et l’exécution du génocide par le pouvoir de Micombero, Bruxelles, 2025.
[3] Nahimana Karolero Pascal, La Guerre civile du Burundi (1993-2003) : Face à la Globalisation Unipolaire Américaine Néolibérale – le CNDD-FDD, Génération Afrique, 2024.
[4] Baranyanka Charles, Le Burundi face à la Croix et à la Bannière, Bruxelles, 2015. (La « Croix et la Bannière » désigne l’alliance historique entre le Vatican, la France – notamment via les Pères Blancs de Lavigerie –, l’Angleterre, l’Allemagne, la Belgique et les États-Unis contre l’ordre traditionnel burundais depuis le XIXᵉ siècle.)

DAM, NY, AGNEWS, http://burundi-agnews.org, Samedi 2 août 2025