Ils sont descendus par milliers sur la capitale pour faire une démonstration de force et dire à la ville au monde qu’il ne faut pas badiner avec un parti politique qui a un passé de rébellion armée. Ce sont les militants du parti au pouvoir. La ville de Bujumbura est paralysée doublement: par ces manifestants et par la pénurie de carburants. Il ne fait aucun doute que le CNDD-FDD fait sentir qu’il est un parti Etat. L’opposition et les activistes de la société civile se sont terrés chez eux. La communauté internationale craint le pire.
Déjà le vendredi 10 avril dans la soirée, le porte parole du parti au pouvoir énumérait les noms d’un autre groupe de frondeurs qui viennent d’être chassés, radiés ou suspendus du parti de Pierre Nkurunziza. Une autre démonstration de force du camp favorable à une nouvelle candidature de Nkurunziza. Un signal fort envoyé à tout militant récalcitrant qui tenterait de se mettre au travers de la route de Nkurunziza vers un nouveau mandat.
Mais c’est surtout pour d’autres visées que le parti au pouvoir mobilise largement à travers toutes les provinces du pays pour venir marcher sur la capitale. La vIlle de Bujumbura est considérée comme le bastion de l’opposition et de la société civile ethniquement tendancieuse. Cette dernière a menacé d’organiser des manifestations dans la capitale si d’aventure Nkurunziza est annoncé pour un nouveau mandat. Comme réponse, les partisans de Nkurunziza débarquent à Bujumbura pour dire : » Le pays est au peuple et nous sommes majoritaires. Si vous voulez faire dérailler le processus électoral, vous aurez affaire à nous. Nous ne craignons rien et nous n’allons pas reculer car avec Nkurunziza, nous sommes toujours songa mbele! »
Avec cette démonstration de force, on dirait une quête du paroxysme des tensions! La situation peut dégénérer si des fauteurs de troubles ou des pêcheurs en eaux troubles profitent de l’aubaine. La sortie de Pierre Buyoya pour clamer son opposition à une nouvelle candidature de Nkurunziza est à interpréter dans le même sens que les propos d’un responsable d’une association des démobilisés ex-FAB qui a crié sa rage et a averti que la confrontation serait inévitable.
Qui va reculer? Ceux qui denient aux institutions et mécanismes chargés du contentieux électoral de faire leur travail le moment venu et les accusent déjà d’être à la solde de Nkurunziza? Ceux qui défendent bec et ongles le droit de Nkurunziza de profiter du flou juridique de la constitution tripatouillée par Domitien NDAYIZEYE? Ou ces activistes de la société civile dont les revendications sont ramenées à un plaidoyer pour l’échec du processus et le début d’une transition?
Au nom de la paix, il faut laisser les mécanismes prévus pour trancher sur cette putain de candidature faire leur travail. Cinq ans pour un pays, c’est rien pour une nation. Et il est possible de limiter ces dégâts d’un parti Etat en participant aux élections pour refuser un autre pouvoir sans partage de ce parti traversé par une crise profonde. Mais il est important de noter que le plan de la « quatrième ethnie » du Burundi réserve des surprises et sera déterminant!
Paul Sorongo