La révision de la Constitution et d’autres textes de lois, la formation patriotique, une justice plus agissante, tels ont été les grands souhaits des participants au dialogue de ce vendredi 29 janvier à Gatumba.
Festus Ntanyungu (debout) rappelle les différentes crises post-électorales que le pays a connues. Au milieu : François Nkengurutse (vice-président CNDI) et la gouverneure. Festus Ntanyungu (debout) rappelle les différentes crises post-électorales que le pays a connues. Au milieu : François Nkengurutse (vice-président CNDI) et la gouverneure.
«Proposez des solutions pour que règne un régime admis et respecté par tout le monde, c’est-à-dire une démocratie durable». Voilà la question que la Commission nationale pour le dialogue inclusif (CNDI) a soumise aux ressortissants de Bujumbura dit « Rural » (parlementaires, administratifs à tous les niveaux et populations, des religieux, forces de défense et de sécurité).
Dans leurs réponses, sur papier duplicateur, les participants ont insisté sur les réformes des textes de lois. Certains ont souhaité que soit supprimé de la Constitution tout ce qui a trait au nombre de mandats « pour permettre au président Nkurunziza de régner à vie ». Pour la durée d’un mandat, certains ont proposé le septennat.
Une nuance quand même : un participant a proposé que tout ce qui concerne le mandat soit bien écrit dans la Constitution pour éviter des équivoques d’interprétation. Le visa faisant référence à l’Accord d’Arusha devrait être supprimé dans la Constitution car, «c’est Arusha, devenu caduc à bien des points, qui est à l’origine de la crise actuelle».
La Constitution devrait être aussi modifiée dans son article 129 « pour permettre à tous ceux qui se sont présentés aux élections d’être récompensés ». Cet article subordonne l’entrée dans les institutions à l’obtention d’au moins 5% dans les différents scrutins.
Un participant a souhaité qu’il y ait alternance ethnique à la tête de l’Etat. Il a été copieusement hué. Un Twa a recommandé une alternance entre les Hutu, les Tutsi et les Twa non seulement à la présidence de la République, mais aussi à tous les postes. Sur ce, un député a suggéré que cette idée d’alternance ethnique soit soumise au référendum.
Des participants ont appelé à la suppression du statut de sénateur à vie aux anciens présidents. Mais la gouverneure de province de nuancer : que ce statut soit supprimé uniquement pour ceux qui sont arrivés au pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat.
Pour des lois plus restrictives
L’ancien journaliste de la RPA, Raymond Zirampaye, appelle à la restriction de la liberté de la presse.L’ancien journaliste de la RPA, Raymond Zirampaye, appelle à la restriction de la liberté de la presse.
L’ancien journaliste de la RPA, Raymond Zirampaye, souhaite l’adoption d’une loi restrictive vis-à-vis de la liberté de la presse. Bien d’autres participants ont recommandé la mise sur pied d’une loi plus sévère envers la société civile. L’Exécutif devrait être trop regardant notamment vis-à-vis des financements des organisations de la société civile et aussi vérifier si les équilibres ethniques sont respectés. Cette loi devrait aussi s’appliquer aux ONG étrangères.
Les partis politiques « qui n’ont pas de membres » et ceux qui ont appelé aux manifestations devraient être radiés. Des participants ont souhaité la mise sur pied d’autres lois : une loi contre ceux qui concoctent des rumeurs, la réinstauration de la peine de mort, une loi interdisant la double nationalité pour les hauts cadres de l’Etat, une loi contre ceux qui médisent les «Benegihugu» (les citoyens), une loi à effets rétroactifs contre les putschistes, une loi instaurant le serment pour les présidents des partis au pouvoir et des candidats à tout scrutin. Un participant a rappelé que les textes légaux devraient être écrits en kirundi.
La Justice doit jouer son rôle
Depuis l’indépendance, l’impunité règne au Burundi, mais la justice a laissé faire, constatent bien des participants. Dorénavant, la justice devrait donc agir. Elle doit notamment « intenter un procès contre la Belgique pour avoir failli à la mission de tutelle que l’ONU lui avait assigné sur le Burundi ».
Des participants ont pointé du doigt la « Belgique pour avoir commandité l’assassinat du prince Louis Rwagasore, héros de l’indépendance, et celui du prince Kamatari ». Elle est aussi « impliquée dans liquidation des deux tiers des parlementaires élus en 1965 ».
Ce n’est pas tout comme requête adressée à la justice : elle est appelée à « engager des poursuites contre ceux qui ont appelé aux manifestations contre le troisième mandat du président Nkurunziza ».
Signalons qu’un juge a fait observer que pour que la justice puisse agir correctement, il faut avant tout que la magistrature soit indépendante de l’Exécutif. Et de proposer que le présent de la République cède la présidence du Conseil national de la magistrature à un juge de carrière.
La formation patriotique pour lutter contre les putschs et les manifestations
Bien des participants ont souhaité que le pouvoir organise des séances de formation patriotique à tous les Burundais, notamment la jeunesse. Sur ce, la gouverneure a appelé à la réinstauration du service militaire obligatoire (SMO).
La formation patriotique s’adresserait aussi aux forces de défense et de sécurité pour être auteurs des coups d’Etat qui ont jalonné l’histoire du pays. Les politiques devraient eux aussi être formés, notamment à la valeur de la vérité.
Autres propositions
Pour qu’il y ait une démocratie durable, le Burundi devrait rompre la coopération militaire avec la Belgique. Bien plus, pour éviter l’ingérence de l’Occident, le Burundi devrait nouer des relations de partenariat économique et financier avec des pays d’autres continents.
Un participant a proposé que l’histoire du pays soit réécrite. La gouverneure a proposé que les démobilisés participent aussi à des missions de maintien de la paix à l’étranger.
Quelqu’un a suggéré que soit banni le militantisme dans les recrutements à la fonction publique, que soient contrôlés les équilibres ethniques dans les forces de défense et de sécurité. Un autre a souhaité que soit créées des conditions pour que les exilés rentrent afin de participer au dialogue, non à Arusha ou à Entebbe, mais au Burundi.