«De par l’histoire, le Burundi n’est pas à l’origine de mauvaises relations avec certains pays»
Le chef de l’Etat, Pierre Nkurunziza, a animé le vendredi 30 décembre 2016, une émission publique au chef- lieu de la province de Rutana. Répondant aux questions des journalistes sur le retard dans le versement des indemnités aux militaires burundais en mission en Somalie, le chef de l’Etat a indiqué que le Burundi a signé le contrat avec l’Union africaine et qu’il compte porter plainte contre cette injustice. Si le mois de janvier s’écoule sans que cette question soit résolue, le Burundi n’exclut pas la possibilité du retrait de ses troupes de l’Amisom, a-t-il dit. Il a répondu à pas d’autres question ou inquiétudes des journalistes et de la population.
« Le pays dépense énormément pour entretenir les troupes en mission ainsi que leurs équipements», a affirmé Pierre Nkurunziza. Ne pas honorer ses engagements vis-à-vis des militaires burundais, dit le président, l’Union africaine fait une injustice inacceptable au moment où ces derniers se sacrifient pour l’Afrique. Cette attitude est une façon d’entraîner le pays dans des dépenses inutiles au moment où les militaires provenant d’autres pays perçoivent leurs salaires régulièrement.
A la question de savoir si le fait que le pays parvient à payer à temps les fonctionnaires de l’Etat et à poursuivre les projets de développement est lié aux promesses du lendemain meilleur qu’il mentionne chaque fois dans ses discours, Pierre Nkurunziza répond par l’affirmative. Il indique que les sanctions de l’Union européenne et des pays européens ont été des sanctions injustes qui ne suivent pas les procédures de coopération. « Nous les avons contestées », dit le numéro un burundais. Selon lui, même si tous les pays prenaient des sanctions injustes envers le Burundi, avec le soutien de Dieu, le développement du pays ne sera pas bloqué.
Des résolutions pour étouffer la souveraineté du pays
Pierre Nkurunziza indique que l’année 2016 est particulièrement riche en matière de construction des infrastructures de grande valeur. S’exprimant sur les relations avec l’Onu, Pierre Nkurunziza rappelle que, pour la première fois dans l’histoire des nations indépendantes, le Burundi a été victime des décisions injustes de la part de cette organisation : seize résolutions dans une année, affirme Pierre Nkurunziza, qui visaient à étouffer la souveraineté du pays. C’est d’autant injuste que depuis les années de l’indépendance jusqu’en 2005, uniquement deux résolutions ont été votées, alors que les exactions contre la population ont été inestimables.
Les journalistes ont voulu savoir si le gouvernement n’accorderait pas d’immunité provisoire aux politiciens en exil et ainsi permettre un dialogue inclusif. A ce sujet, Pierre Nkurunziza indique que, depuis les années 1961 jusqu’en 1993, un groupe de gens s’est arrogé le droit de contester dans le sang la volonté populaire. C’est ce même groupe, dit le chef de l’exécutif burundais, qui a tenté en 2015 de replonger le pays dans les larmes. « Certains d’entre eux ont été arrêtés et font face à la justice et d’autres sont encore en cavale au Rwanda et en Belgique », a dit le chef de l’Etat. Cependant, poursuit le président, les temps sont révolus et l’impunité des crimes ne saura devenir une habitude. Il encourage par ailleurs ceux qui se sont rendus coupables des perturbations de la paix et de la sécurité de répondre à la justice et de demander pardon pour leurs actes.
Sur le dialogue piloté par la communauté de l’Afrique de l’Est, Pierre Nkurunziza indique que ce dialogue reste important au moment où il y a des questions sur lesquelles les politiciens doivent s’entendre et surtout la préparation des élections de 2020. Ce dialogue, poursuit le président, permettra également aux Burundais qui ont fui le pays récemment et depuis de longues dates de contribuer à la reconstruction de leur pays.
« Le problème burundais n’est pas un problème de mandat »
A la question de savoir s’il sera candidat pour sa propre succession au cas où la nouvelle Constitution changerait et inclurait des clauses qui ne limitent pas les mandats présidentiels, Pierre Nkurunziza répond qu’il ne trahira pas la volonté du peuple. Ce que j’ai dit, ajoute Pierre Nkurunziza, correspond au respect de la loi en vigueur. « Le problème burundais n’est pas un problème de mandat », affirme le président. C’est une question liée à la richesse du Burundi, a-t-il ajouté. L’objectif est d’empêcher l’exploitation des mines, car certains pays voudraient avoir une mainmise sur ces richesses du pays.
S’exprimant sur les relations tendues entre le Burundi et le Rwanda, Pierre Nkurunziza indique que le Burundi n’est pas à l’origine de ces mauvaises relations de par l’histoire. Il indique que le pays n’a jamais eu de problème avec la Tanzanie et la RDC, alors que le Rwanda a, de par l’histoire, affiché un comportement agresseur face au Burundi jusqu’aujourd’hui. Le Burundi, dit-il, reste disponible à accepter la relance de la coopération au cas où ces pays le voudraient et demanderaient pardon pour leurs agissements. Au cas contraire, le président Nkurunziza n’a pas exclu la rupture des relations avec ces pays.
Revenant sur la question des taxes et impôts élevés, Pierre Nkurunziza demande aux Burundais de comprendre que payer les impôts et taxes est un acte patriotique. Ils sont destinés à financer les projets de développement, au paiement des salaires et à la défense et la sécurité du pays, etc. Le président a également répondu à la question de l’adoption, par les deux chambres du parlement, de la loi sur la formation militaire des anciens combattants. Selon lui, tous les pays du monde le font. Cette mesure, poursuit le président, ne signifie pas que le pays se prépare à faire la guerre, mais qu’elle est une stratégie préventive et dissuasive.
Concernant les sorties du chef de l’Etat à l’extérieur du pays, les journalistes ont cherché à savoir si, dans la mesure où le Burundi vient de se doter d’un avion présidentiel, il pourra cette fois-ci sortir pour représenter le Burundi dans des conférences ou sommets internationaux. Le président de la République dit qu’il a été élu pour travailler à l’intérieur du pays et non à l’exterieur. Selon lui, s’il s’avère nécessaire, il pourra sortir ou se faire représenter par ses collaborateurs puisque la loi le lui autorise.
« Ce qui se faisait dans le temps n’est plus possible pour le moment »
Réagissant à la question en rapport avec la suspension des bourses pour les étudiants des universités, M. Nkurunziza invite les gens à savoir que les choses ont changé du fait que les établissements universitaires et les étudiants ont sensiblement augmenté. Selon lui, dans le temps, il n’y avait qu’une seule université avec un effectif total de deux mille étudiants, alors qu’aujourd’hui, le Burundi compte autour de quarante universités avec un effectif de plus de vingt mille étudiants. Pour dire que, selon le chef de l’Etat, ce qui se faisait dans le temps n’est plus possible pour le moment à voir comment la population estudiantine ne cesse d’accroître. Il invite les gens à savoir qu’il n’y a plus beaucoup de pays dans le monde qui donnent encore des bourses aux étudiants.
Il a souligné que, désormais, les étudiants bénéficieront de crédits sans intérêts pour se payer les études. Il trouve néanmoins déplorable le fait que certains étudiants sont allés étudier à l’étranger sur les frais de l’Etat et qu’après leurs études ils ont préféré rester à l’étranger pour servir d’autres pays au lieu de venir servir leur patrie qui a payé leurs études. « Il faut qu’ils sachent qu’ils ont une grande dette envers leur pays et le peuple burundais », a-t-il ajouté.
Au cours de cette émission, le chef de l’Etat a eu à répondre aux inquiétudes en rapport avec la nouvelle loi portant cadre général de coopération entre le Burundi et les organisations non gouvernementales (ONG). Les journalistes avaient cherché à savoir si la mise en application de cette loi ne va pas pousser les ONG à quitter le Burundi. A ce sujets, le président de la République a fait savoir que, partout dans le monde, il a été constaté que certaines organisations non gouvernementales contribuent dans la déstabilisation des pays et dans la distribution des stupéfiants aux jeunes, même ici au Burundi. Selon lui, il s’est observé également des divisions ou des exclusions dans les recrutements. Donc, a-t-il ajouté, cette loi a été adoptée dans l’esprit de combler toutes les lacunes qui s’observent dans les activités des ONG. Il a ainsi tranquillisé la population en les appelants à ne pas avoir peur de cette loi et a indiqué que les organisations non gouvernementales qui vont s’adonner à la déstabilisation du pays seront chassées si cela s’avère nécessaire.
Les fonctionnaires sont invités à bien servir la population
Une autre question à laquelle le chef de l’Etat a répondu était en rapport avec la pénurie du sucre. Là aussi, il a invité les gens à comprendre que la Société sucrière du Moso (Sosumo) est trop petite pour satisfaire la demande en sucre. Il a ainsi déploré le fait que, malgré la pénurie du sucre, il existe des gens qui l’utilisent dans la fabrication des boissons prohibées. Mais, il a souligné que, s’il s’avère nécessaire, on va permettre aux commerçants d’importer le sucre avec la montée des taxes à l’appui sur le sucre importé.
A propos de la gratuité des soins de santé des femmes enceintes et des enfants de moins de cinq ans, les journalistes ont cherché à savoir si cette gratuité ne serait pas un encouragement à mettre au monde beaucoup d’enfants. Sur ce, le président Nkurunziza a d’abord indiqué que cette mesure doit se poursuivre, en ce sens qu’elle a aidé pas mal de familles, surtout celles à faibles revenus, à satisfaire les soins de santé de leurs enfants. Mais, il s’est insurgé contre les agissements des certains hommes qui ont profité de cette gratuité des soins pour s’adonner au concubinage ou à la polygamie, de telle sorte que certains peuvent engrosser cinq femmes par an. A cet effet, il a indiqué qu’on va réviser la loi qui accompagne cette mesure pour redresser et corriger toutes les lacunes liées à cette mesure.
Le chef de l’Etat a également fustigé les commerçants qui font monter les prix des denrées alimentaires sous prétexte que le dollar a monté, alors que cela n’a rien à voir. Il s’est également exprimé à propos des fonctionnaires qui arrivent en retard au boulot ou qui quittent avant le temps leur boulot ou qui, une fois arrivé à leur service, passent leur temps à discuter ou à téléphoner au lieu de servir les gens qui viennent solliciter leurs services. Pour tous ces gens, il les a mis en garde et a dit que des mesures seront prises pour les redresser. Pour les fonctionnaires, ils vont bénéficier de séances de formation patriotique au cours de laquelle ils seront sensibilisés à servir correctement la population.
Concernant le dialogue interburundais interne ou externe, le président Nkurunziza a indiqué que tout Burundais de l’extérieur ou de l’intérieur a le plein droit de dire ou de donner son avis sur le renforcement de la bonne gouvernance, de la paix et de la sécurité au Burundi. A propos du dialogue externe, il a souligné que ceux qui sont poursuivis par la justice ne sont jamais invités à ce dialogue avant que la justice n’ait fait son travail. Il leur a demandé de ne pas jeter le tort au médiateur Mkapa, mais de répondre eux-mêmes à la justice afin qu’ils soient jugés, chacun, sur sa part dans la déstabilisation du pays et dans la tentative de coup d’Etat.
A propos du processus en cours de l’harmonisation des salaires et de la gestion des annales, le chef de l’Etat s’est exprimé en disant qu’en ce qui concerne les annales, il n’y a plus rien à dire, car cette mesure a été prise sur consentement et après s’être entendu avec les concernés. Il a d’ailleurs mis en garde quiconque tenterait de passer outre cette mesure, disant qu’il sera sévèrement puni et que ceux qui ont eu des annales, alors que cette mesure était déjà prise devront obligatoirement rembourser la somme perçue.
Charles Makoto et Astère Nduwamungu, http://www.ppbdi.com