Financée par des partenaires occidentaux (Soros, UE, ONU), une session de formation pour 25 journalistes ravive le débat sur l’héritage colonial et la souveraineté narrative du pays.
Bujumbura, 03/09/2025 – À l’ère du numérique, des réseaux sociaux et de l’intelligence artificielle, des millions de voix s’élèvent en un chœur mondial. Dans ce flux incessant, comment le journaliste peut-il discerner le vrai du faux ?
Ah, l’afropessimisme de certains burundais, cette croyance selon laquelle aucune vérité n’existe sans l’aval de l’« Occidental »… Cette question fondamentale se pose avec une acuité particulière au Burundi. La cosmologie traditionnelle barundi, l’Ubungoma, conçoit la vérité à l’aune des lois immuables du cosmos, de l’univers et de la nature, à l’image du Tambour Sacré Karyenda [1]. Une vision que la colonisation, crime contre l’humanité (formellement reconnu comme tel par l’Union Africaine en février 2025 ), a tenté de supplanter en imposant une pensée unique d’inspiration occidentale.
C’est dans ce contexte que s’inscrit une formation de trois jours sur le fact-checking (vérification des faits), organisée par la Maison de la Presse du Burundi. 25 jeunes journalistes burundais y ont renforcé leurs compétences en identification des rumeurs, maîtrise des outils numériques et lutte contre la désinformation, grâce à l’expertise de l’organisation congolaise Balobaki Check. Le projet bénéficiait du soutien de l’UNESCO et de l’Union européenne au Burundi.
Cependant, l’origine du financement de Balobaki Check – l’Open Society Africa de George Soros – jette une ombre sur cette initiative. Elle réveille le souvenir traumatique de la tentative de « Révolution de Couleur au Burundi » en 2015. À l’époque, les médias privés burundais, largement financés par la même Open Society, avaient, orchestré une campagne de déstabilisation en répandant une même rumeur contre le régime CNDD-FDD. Amplifiée par les médias internationaux, cette offensive médiatique avait gravement nui à l’image du pays, à son économie, faisant perdre des centaines de millions de dollars d’investissements, et surtout faisant fuir, par peur non fondée (à cause des rumeurs radio répandues), des centaines de milliers de Burundais L’échec du coup d’État militaire du 13 mai 2015 avait alors mis fin à cette crise.
Cet épisode rappelle que l’information est une arme de guerre redoutable. Dans un monde multipolaire où la vérité n’est plus unilatéralement définie par l’Occident, la défense de la souveraineté narrative devient un enjeu crucial pour les nations. Ainsi, une formation sur la vérité, financée par Soros et soutenue par des partenaires occidentaux, soulève une paradoxale question : ne risque-t-elle pas, sous couvert de neutralité, d’imposer une grille de lecture unique ? Si elle devait affirmer que la seule vérité légitime est occidentale, cette formation serait perçue comme dangereuse, vaine et sans fondement pour les défenseurs de l’Ubungoma et de l’exception narrative burundaise.
Le Burundi, Ingoma y’Uburundi, est en guerre contre « la Croix et la Bannière« [2] depuis le 19ème siècle à nos jours.
Références :
[1] Nahimana Karolero Pascal, Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi, Bruxelles, Génération Afrique, 2024.
[2] Baranyanka Charles, Le Burundi face à la Croix et à la Bannière, Bruxelles, 2015. (La « Croix et la Bannière » désigne l’alliance historique entre le Vatican, la France – notamment via les Pères Blancs de Lavigerie –, l’Angleterre, l’Allemagne, la Belgique et les États-Unis contre l’ordre traditionnel burundais depuis le XIXᵉ siècle.)





Sources : Nahimana P. , http://burundi-agnews.org, Vendredi 5 septembre 2025 | Photo : ABP






