Alors que la presse peut subir des pressions politiques, les blogueurs choisissent de raconter leur pays d’une manière décalée. Afin d’avoir plus de visibilité, une vingtaine d’entre eux ont décidé de regrouper leurs productions sur une plateforme commune, « Yaga », visible sur internet depuis le 17 mars.

« Yaga »-, « raconter » en kirundi, est une plateforme qui regroupe les productions d’une vingtaine de blogueurs du pays. S’ils ont chacun leur domaine de prédilection, les élections générales vont pourtant concentrer leur attention. « On sera témoin, explique Armel Gilbert Bukeyeneza, le porteur du projet. On racontera ce qui se passe partout dans le pays et de manière efficace en organisant un système de réseau. »

Si la pratique du blog se développe au Burundi, c’est sans doute parce que celle du journalisme y est difficile pour des raisons économiques, mais surtout politiques. Classé 142e sur 180 pays en terme de liberté de la presse par Reporter sans frontières en 2014, la législation limite considérablement les droits des journalistes. De plus, l’accès à internet plus facile et moins onéreux sur les téléphones mobiles profite au développement de formats moins stricts comme le blog. C’est donc dans ce contexte que « Yaga » a vu le jour grâce à la motivation de quelques blogueurs et le soutien de Waza, projet de Radio Netherlands Worldwide (RNW).

« Bâtir une communauté solide »

« Notre ambition est de bâtir une communauté solide pour qu’elle devienne une référence pour les jeunes au Burundi en matière de liberté d’expression », précise Armel Gilbert Bukeyeneza. Certains blogueurs ont reçu une formation de journaliste et ont commencé dans des rédactions traditionnelles comme Dacia Munezero. « Le blog est une porte de liberté pour tous les jeunes, c’est un endroit où tu écris ce que tu veux. Moi, je cherche toujours un angle décalé pour dédramatiser », détaille cette jeune fille énergique de 26 ans. Passionnée par la culture et la question des femmes, elle dresse régulièrement sur Mon point de vue le portrait de Burundais porteurs d’initiatives originales.

Les blogueurs font des choix qui plaisent et trouvent leur public. « Je lis notamment le blog d’Alain parce que j’ai envie de connaître ce qui se passe dans le pays, explique Clémence, une étudiante. Je m’informe sur son blog plus qu’ailleurs car il parle de l’actualité et fait des réflexions un peu amusantes… « Parfois, c’est avec vigueur, comme dans son billet « Pourquoi #JeSuisCharlie », qu’il dénonce les silences qui entourent les violences au Burundi. Armel Gilbert Bukeyeneza comptabilise environ 1 000 vues par post tout comme Alain Amrah Horutanga, sans doute parmi les blogueurs les plus en vue de la capitale.