Hassan NGENDAKUMANA Bruxelles, 15/04/2014 Royaume de Belgique
A Monsieur Léonce Ngendakumana
Président du parti Sahwanya FRODEBU
à Bujumbura
Objet : A propos de vos allégations diffamatoires
Monsieur Léonce Ngendakumana
Je vous écris cette lettre pour vous rappeler certaines choses que vous faites semblant d’oublier mais aussi pour vous interpeler sur votre façon indigne de vouloir accéder au pouvoir par des allégations honteuses sans précédents.
Monsieur Léonce Ngendakumana, je sais que vous êtes bien placés pour mieux comprendre la lourdeur du mot « génocide ». C’est un crime hors du commun et incomparable. Comme le décrit Jacques Sémelin, c’est une violence qui tend vers l’extrême, comme on dit d’une valeur, dans une équation, qu’elle tend vers l’infini. Elle tend à produire des milliers, des centaines, des dizaines des milliers de morts. Elle tend à produire des gestes de cruauté et d’atrocité sur les corps, avant et après la mort qui dépasse l’entendement.
Monsieur Léonce Ngendakumana, dites-moi franchement, êtes-vous conscients des implications ou des conséquences de vos déclarations affirmatives et délibérées d’un génocide en préparation au Burundi? Au cas où vous avez oublié (ce qui arrive souvent chez vous), puis-je me permettre de vous rappeler ce qui s’est dit et écrit autour de vous, de vos compagnons politiques et de votre parti politique le FROBEBU ?
Monsieur Léonce Ngendakumana, J’ai fouillé dans les archives des journaux d’après l’assassinat de Ndadaye, que dites-vous et que pensez-vous de ceux qui ont écrit que :
1. « Melchior Ndadaye et ses compagnons ont, en effet, été injustement tués le 21 octobre 1993. Triste et regrettable destin. Mais si injuste soit-elle, leur disparition ne devrait pas pour autant occulter celle, davantage tragique et curieusement programmée, des centaines de milliers de tutsis qu’elle a automatiquement entraînée dans son sillage. Dans le cadre d’un historique génocide minutieusement et préalablement préparé du vivant de Melchior Ndadaye. Sa mort n’aura finalement été qu’un élément déclencheur. Un catalyseur pour ainsi dire. Que la terre de ses ancêtres lui soit légère. Mais rien n’est moins sûr. Car les nombreuses victimes du génocide anti-tutsi dont son organisation avait servi de laboratoire doivent indubitablement lui peser lourdement. C’est ainsi que Melchior Ndadaye, alors tête d’affiche du leadership hutu aux mains littéralement entachées de sang des tutsis, caracole déjà au piédestal des héros nationaux. »
2. « Le Président Buyoya veut faire du Frodebu son partenaire privilégié dans ce qu’il appelle scandaleusement « processus de paix », pour partager avec Minani Jean la haute direction des affaires de l’Etat, pour assurer l’impunité aux vulgaires génocidaires du Frodebu et ses alliés, transformés à l’occasion en « leaders politiques » au moment où les génocidaires rwandais de la même école et qui ont commis le même crime, sont traqués de part le monde entier et jugés au Tribunal Pénal International d’Arusha »!
3. « La milice génocidaire JEDEBU (jeunesse démocratique du Burundi) à l’image d’Interahamwe a été entrainée et armée par les hauts dignitaires de FRODEBU pour anéantir l’ethnie tutsi sous prétexte de venger leur président hutu Melchior Ndadaye. »
Monsieur Léonce Ngendakumana, êtes-vous d’accord avec ces écrits vous accusant d’être terroristes génocidaires ? Quel sentiment avez-vous quand vous lisez des choses pareilles sur vous et votre famille politique ? Pouvez-vous supporter des telles accusations ? Certainement pas. Pour preuve, n’est-ce pas vous qui, alors Président de l’assemblée nationale en 1997 avez porté plainte contre le procureur général de la république, Mr Jean Bosco BUTASI devant le ministre de la justice dans le dossier qui vous opposait au ministère public vous accusant des crimes de génocide? Pourquoi avez-vous fait ça ? Avez-vous oublié pourquoi ? si vous vous rappelez, alors, pourquoi accusez-vous injustement les autres? Le mot génocide n’est pas à attribuer n’importe comment Monsieur Léonce, ce n’est pas une marchandise, c’est plus fort, très fort.
Monsieur Léonce Ngendakumana, celui qui a dit qu’un politicien burundais affamé n’a point d’oreille ou de raison, il n’a pas tord. Même si en politique tous les coups sont permis, parler de génocide en préparation, c’est franchir la ligne rouge et c’est inacceptable. Même si il est vrai que c’est dur d’être opposant politique en Afrique, même si il est vrai qu’il y a encore à faire au Burundi pour asseoir une démocratie à l’européenne, même si je comprends que vous en avez marre du système CNDD-FDD, que vous en avez vraiment ras-le-bol, rien ne peut justifier tes déclarations diffamatoires. Toute fois si vous constatez que le pouvoir CNDD-FDD gère mal le pays, ça devrait être une aubaine pour vous aux élections de l’an prochain, au lieu de vouloir désinformer et convaincre les occidentaux sur la mauvaise gestion du pays par le CNDD-FDD, essayez plutôt d’informer et de convaincre le peuple burundais car c’est lui qui se rendra aux urnes pour trancher, à moins que vous vouliez que ce soient ces occidentaux qui choisissent à la place des burundais et dans ce cas pourra-t-on parler de la démocratie que vous nous chantez à chaque instant ou de l’imposition extérieure?
Monsieur Léonce Ngendakumana, j’ai besoin des éclaircissements, vous qui peut être s’y connaissez mieux de comment on planifie le génocide, dites-moi : qui sont visés par cette extermination ? Sont-ce les hutus ? Les tutsis ? Les Upronistes ? Les Frodebustes ? L’IKIBIRI ? Les musulmans ? Les chrétiens ? Et qui finalement va profiter de ce génocide ?
Monsieur Léonce Ngendakumana, je termine ma lettre en vous rappelant que vous oubliez hyper vite, vous pourrez dire tout ce vous voulez sur le pouvoir CNDD-FDD mais de grâce, évitez de parler de cet imaginaire génocide en préparation car, je suis convaincu que vu les faits historiques récents et la configuration géopolitique de la sous région et vu l’évolution de la mentalité burundaise, le CNDD-FDD n’a pas besoin du génocide pour gouverner le pays ou du moins pour gagner les élections. Mais si par contre vous Léonce Ngendakumana, vous voyez que c’est le seul moyen, la seule option d’accéder au pouvoir, ça n’engage que vous et vous seul. Mais dans ce cas vous ferez face non pas le pouvoir de Bujumbura, mais celui des juges de la CPI à Den Haag.
Dans l’attente de votre réponse, veuillez agréer, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.
Hassan NGENDAKUMANA