Allocution de S.E. Mr l’Ambassadeur Thérence Ntahiraja à l’occasion de sa présentation officielle au comité des Ambassadeurs ACP à Bruxelles le 29/01/2020
  • Excellence Monsieur le Président du Comité des Ambassadeurs,
  • Monsieur le Secrétaire Général,
  • Excellences Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et Chers collègues,
  • Distingués Représentants de vos pays respectifs,
  • Mesdames, Messieurs,

 

  1. C’est un grand honneur et un plaisir pour moi d’être parmi vous aujourd’hui à l’occasion de ma présentation officielle au Comité des Ambassadeurs.
  2. Je vous exprime ma profonde gratitude pour l’accueil plus que chaleureux et fraternel que vous me réservez au sein du Comité des Ambassadeurs ACP par les mots touchants que vous venez de prononcer à mon égard.
  3. Je vous assure de mon entière disponibilité et de la collaboration de ma Délégation pour contribuer à relever les nombreux défis de notre Organisation qui est à la croisée des chemins, surtout avec les négociations en cours avec l’UE sur le nouvel Accord successeur à l’Accord de Cotonou. Je me rends compte que le travail qui nous attend est énorme.
  4. Je tiens à féliciter les négociateurs et les différents Comités pour tout ce qu’ils ont déjà réalisé. Je suis convaincu que j’apprendrai beaucoup de leurs expériences.
  5. Mon pays le Burundi est membre de la famille ACP depuis le 1er décembre 1975. Nos Autorités croient en les avantages qu’offre le multilatéralisme, la coopération Sud-Sud et triangulaire et en la nécessité de la solidarité entre les membres de notre Groupe. Elles font leur les 3 piliers stratégiques contenus dans le document « Vers le Groupe ACP que nous souhaitons». 
  6. Deux grands chantiers prioritaires occupent les Burundais en 2020, à savoir les élections de 2020 et la poursuite de la mise en œuvre du Plan National de Développement (PND 2018-2027). 
  7. Concernant les Elections de 2020, rien n’a été épargné pour que ces Elections soient les plus libres, transparentes, démocratiques, apaisées et les plus inclusives. Et à cet effet,
  • La nouvelle Constitution de la République promulguée le 7 juin 2018 respecte pleinement l’Accord d’Arusha de 2000 auquel le Gouvernement et la population Burundaise attachent une très grande importance ; 
  • La CENI a présenté le 28 juin 2019 à tous les acteurs et partenaires, le calendrier électoral 2020 qui précise que : 

1° La date du 20 mai 2020 est consacrée à l’élection présidentielle, l’élection des députés et l’élection des Conseillers communaux ; 

2° La date du 20 juillet 2020 est prévue pour l’élection des Sénateurs ; 

3° La date du 24 août 2020 quant à elle est prévue pour l’élection des Conseillers des Collines et des Quartiers. 

  • Dans le but de renforcer la démocratie, le parti CNDD-FDD qui est au pouvoir a, en date du 7 novembre 2019, organisé des élections primaires au sein de ses membres sur environ 3000 collines et quartiers du Burundi. Ces élections à la base a permis à ce parti au pouvoir d’obtenir, sur chaque colline ou quartier, 5 personnes en qui la population a confiance et qui sont susceptibles d’être prioritaires sur les listes électorales des Députés, des Sénateurs, des Conseillers communaux et des Conseillers collinaires ou de quartiers. 
  • Dans cette même perspective des élections de 2020, certains partis politique de l’opposition ont déjà choisi leurs candidats à la présidentielle de mai 2020. Et, en date du 26 janvier 2020, le Parti CNDD-FDD a organisé un Congrès extraordinaire au cours duquel les membres de ce Parti ont élu un nouveau candidat, le Général Major Evariste NDAYISHIMIYE qui remplacera S.E Pierre NKURUNZIZA, Président de la République du Burundi, surtout que ce dernier, a déjà précisé, à maintes reprise, qu’il ne se présentera pas aux élections de 2020.
  1. Quant à la mise en œuvre du Plan National de Développement (PND 2018-2027), ce dernier est en harmonie avec les 3 Piliers stratégiques du Groupe des Etats ACP. il ne s’écarte pas non plus de l’Agenda 2030 pour lutter contre la pauvreté et atteindre les ODD. Donc, ce PNDS vise la transformation structurelle de notre économie par la dynamisation des secteurs porteurs de croissance et créateurs d’emplois.
  1. Concrètement, une dizaine des secteurs d’investissement prioritaires ont été définis par le Gouvernement Burundais:

1°.L’Agriculture-élevage-agro-industrie ; 

2°.La production de l’énergie ; 

3°.L’amélioration de la connaissance basée sur la technologie et le savoir-faire ; 

4°.Le développement du secteur des ressources naturelles dont celui des minerais ;

5°.La création d’un environnement favorable à l’industrialisation ;

6° Le renforcement du capital humain ;

7°.Le renforcement des infrastructures de transport, du commerce et des TIC ;

8°.La promotion du tourisme ;

9°.Le Partenariat Public-Privé (PPP) ;

10°.L’Intégration régionale et la coopération internationale.

  • A cet effet, le Gouvernement du Burundi est en train de mobiliser des ressources internes nécessaires au financement de la majeure partie de ses priorités identifiées et de rechercher des partenaires, surtout dans le cadre de la Coopération Sud-Sud.
  • En outre, Nul n’ignore que le Burundi est, depuis l’année 2015, sous sanctions de l’UE en vertu de l’article 96 de l’Accord de Cotonou. Cependant, le Gouvernement Burundais estime que cela découle d’une erreur de jugement et d’une volonté manifeste de fouler aux pieds notre droit à la souveraineté nationale, du manque de respect de nos Institutions démocratiquement élues et de nos lois et règlements.
  • En effet, les raisons évoquées par certains de nos partenaires européens et qui ne sont que des prétextes sont les suivantes :
  • le 3ème mandat du Chef de l’Etat qu’ils jugent inconstitutionnel en dépit de l’arrêt de la Cour Constitutionnelle du Burundi du 4 mai 2015 (Et c’est la seule Institution compétente pour interpréter notre Constitution) et le jugement rendu le 19 juillet 2015 par la Cour de justice de l’EAC. Les décisions des 2 Tribunaux confirment la légalité constitutionnelle de la candidature du Président Pierre NKURUNZIZA à l’élection présidentielle de 2015 ; 
  • Atteintes à la liberté d’association et à la liberté d’expression alors que plus de 8000 Associations sans but lucratif sont agréés et fonctionnent normalement. Vingt radios locales publiques et indépendantes, 4 radios communautaires et 7 radios télévisions émettent sur le territoire du Burundi. 24 Journaux périodiques, publics et indépendants, 17 sites internet, 12 associations et organes professionnels de la presse sont opérationnels. 
  • Libération sans conditions des prisonniers politiques. Or, actuellement, il n’y a pas de prisonniers politiques au Burundi car, de 2016 à 2019, le Chef de l’Etat Burundais a déjà gracié 8497 personnes ; 
  • Dialogue politique inclusif (avec la facilitation de l’EAC, de l’UA ou d’un autre Médiateur international). Ledit dialogue a été très organisé tant à l’intérieur du pays pour la population qu’à l’extérieur pour les politiciens et la société civile. Ce dialogue inclusif a abouti au Référendum constitutionnel du 17 mai 2018 et à une Feuille de Route consensuelle conduisant aux élections de 2020. 
  • Justice : Mener des enquêtes sur les allégations de tortures et exécutions extra judiciaires et publier les conclusions. Dans ce domaine, plusieurs dizaines de milliers de procès ont été exécutés dans le cadre du renforcement de la justice pour tous, tandis que des milliers de vulnérables ont gratuitement bénéficié de l’assistance des avocats. 
  • Désarmement de la population civile armée, avec le concours des observateurs internationaux (Autoriser la présence au Burundi de la MAPROBU). Ici c’était une diversion et un prétexte pour amener des troupes d’occupation qui les aideraient à changer le régime par la force. 
  • Ré-adhérer au Statut de Rome (à la CPI). Il s’agit ici d’une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du Statut de Rome en son article 127 parlant du retrait. C’est une question de souveraineté nationale. Signalons ici que c’est l’organe compétent (le Parlement du Burundi) qui a pris cette décision de se retirer conformément à l’article 127. 
  • Retour des réfugiés et des opposants politiques. Signalons ici que environs 400 000 réfugiés de 2015, plus de 226 000 rapatriés ont été enregistrés depuis 2016 jusqu’aujourd’hui. Néanmoins, le Gouvernent Burundais déplore l’attitude peu coopérative et inamicale d’un des pays de l’EAC de prendre en otage nos citoyens réfugiés dans ce pays. 
  • Violences et intimidations présumées de la Ligue des Jeunes du Parti au pouvoir « Imbonerakure » contre la population. Il s’agit des jeunes membres du parti au pouvoir âgés de 18 à 35 ans. Ces jeunes ont refusé les sollicitations de l’opposition radicale pour déstabiliser le pays. 
  1. En réalité, les deux raisons que nos partenaires de l’UE n’avouent pas au public sont les suivantes:

       1) Le refus des Autorités burundaises d’autoriser l’installation d’une base militaire d’une Grande Puissance d’une part ;

       2) D’autre part, le changement du code minier du Burundi.
Le nouveau code minier (Loi 1/21 du 15 octobre 2013 portant code minier) accorde aux investisseurs des baux emphytéotiques de 25 ans renouvelables (contre 99 ans dans l’ancien code) et l’augmentation des taxes à payer à l’Etat pour les entreprises d’exploitation minière.

  1. Les ressources minières dont regorge le Burundi (terres rares, or, nickel, vanadium, pétrole, etc.) aiguisent tellement l’appétit de certaines multinationales minières que leurs commissionnaires européens et africains de la Région des Grands Lacs incitent certaines Institutions et certains Gouvernements partenaires du Burundi en Occident à tout faire pour y effectuer par la force un changement de régime et y installer un pouvoir marionnette à leur service au détriment des intérêts vitaux de notre population et de la stabilité du pays et de la Région des Grands Lacs.

Les terres rares sont utilisées dans la fabrication de produits de haute technologie. Ce qui fait qu’avec le boom du numérique, elles sont considérées comme des métaux stratégiques.

  1. L’UE est malheureusement tombée dans ce piège malgré les nombreux outils à sa disposition pour se rendre compte de la réalité au Burundi. Nos partenaires européens font une lecture erronée de la situation au Burundi, lecture en déphasage avec la réalité, qui les amène à prendre des décisions contraires à la morale et au droit international. J’aurai l’occasion de vous donner plus de détails dans les jours à venir.
  2. Depuis 2016, le Parlement du Burundi a invité officiellement le Parlement européen et les membres de la Chambre des Représentants du Royaume de Belgique à visiter le Burundi pour se rendre compte de la réalité qui y prévaut. Ces invitations sont restées sans réponse favorable.
  3. Ma Délégation compte sur l’esprit de solidarité et d’union de vos Délégations pour amener l’UE à lever sans conditions ces sanctions injustes qui sanctionnent la majorité de la population nécessiteuse et innocente. Ces sanctions sont plutôt facteurs d’instabilité politique, de menace à la paix et à la sécurité du Burundi que de promotion de la démocratie ou d’atteinte des ODD (Agenda 2030).
  4. Comme l’a déjà demandé la Délégation du Burundi à la 110ème Session du Conseil des Ministres ACP à Nairobi et lors des sessions ministérielles précédentes, Je sollicite votre soutien devant nos partenaires de l’UE afin qu’ils corrigent cette lecture erronée de la situation au Burundi, lecture en déphasage avec la réalité et qui les amène à des décisions contraires à la morale et au droit. Il en résulte des tensions inutiles génératrices d’instabilité dont nous tous pourrions nous passer. Qu’ils soient respectueux de notre souveraineté, du choix de notre population et des Institutions dont elle s’est dotée démocratiquement.
  5. Ce traitement humiliant, injuste et irrespectueux servi hier au Togo et au Zimbabwe et aujourd’hui au Burundi pourrait être servi demain à un autre pays membre de notre Groupe ACP.
  1. Pour terminer, j’invite les membres de ce Comité des Ambassadeurs ainsi que le Secrétariat général à visiter le Burundi pour se rendre compte des avancées significatives en matière de paix, de sécurité, de dialogue politique, de liberté d’expression, de respect des droits de la personne humaine, du retour et de la réinstallation des réfugiés et du respect de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation.

Je vous remercie de votre aimable attention