« C’est une surprise et une grande déception de constater qu’une grande manne des finances publiques s’est retrouvée dans les poches de certains de nos compatriotes. C’est vraiment sidérant. Le manque à gagner donne du tournis », s’indigne Faustin Ndikumana, président de l’association Parole et action pour le réveil des consciences et l’évolution des mentalités (Parcem).
Il regrette le fait que les communes affichent parfois des faiblesses au niveau institutionnel. « Elles ne parviennent pas parfois à payer à temps les salaires de leurs fonctionnaires où bien accusent des arriérés de salaires énormes alors que des milliards de francs burundais sont détournés ».
Pour ce militant pour la bonne gouvernance, c’est une preuve que la corruption dans toutes ses formes s’est implantée au Burundi et exige une énergie forte pour la combattre. « Il y a même des réseaux du haut à la base qui se sont constitués et qui sont indéboulonnables. Il faut qu’ils soient cassés », martèle-t-il
Et de déplorer qu’il y a une mentalité du travail honnête qui commence à disparaître dans l’esprit des Burundais. D’après lui, il y a des gens dont la survie dépend du mensonge, de l’escroquerie, du détournement sans toutefois fournir d’efforts.
Il précise que le laisser-aller et l’impunité sont à l’origine de ce comportement. « Il y a des gens qui considèrent leurs partis politiques comme leurs boucliers protecteurs à travers le fameux contrat « je te finance, tu me protèges ».
Des mesures encourageantes
M. Ndikumana se réjouit de la mesure prise par le ministère chargé de l’Intérieur, du Développement Communautaire et de la Sécurité publique de suspendre tous les comptables communaux. Selon lui, ledit ministère manifeste une énergie et une volonté de réussir là où les autres ont échoué.
Interrogé sur ce qui fonde son espoir, il fait savoir qu’on commence à joindre les actes à la parole. « On commence à avoir l’accompagnement d’actes concrets. C’est une nouveauté. Les gens n’étaient pas habitués à voir cela et surtout quand une mesure est prise, tout le monde doit l’appliquer ».
M. Ndikumana soutient mordicus les mesures déjà prises dans la lutte contre la corruption. « Quand la situation a déjà atteint son paroxysme, il faut des mesures fortes. C’est pour lancer un message ».
« Il faut des mesures d’accompagnements »
Le président national de Parcem recommande la destitution des administrateurs communaux ayant été reconduits dans leurs fonctions. « Comme les administrateurs communaux sont les premiers gestionnaires des affaires de la commune, ils ne peuvent pas être étrangers à ce circuit ».
Il encourage davantage le système de collecte de ces taxes. Pour lui, il faut le recrutement et la formation d’autres percepteurs, des moyens logistiques pour que le niveau déjà atteint ne recule pas.
Faustin Ndikumana suggère une stratégie globale de lutte contre la corruption au niveau macro-politique qui intègre tous les ministères, les hauts cadres de l’Etat, la société civile, le secteur privé pour créer une sorte de synergie nationale anti-corruption. Il insiste sur la sensibilisation de la population pour promouvoir le respect du bien public.
Par ailleurs, poursuit-il, il faut mettre à contribution les services techniques gouvernementaux, les institutions de contrôle dont l’Inspection générale de l’Etat, l’Inspection des finances communales, la Cour des comptes. « Il faut les doter des moyens matériels et humains suffisants avec un soutien politique nécessaire pour qu’ils puissent jouer pleinement leur rôle ».
Et de faire observer que le ministère chargé de l’Intérieur ne peut pas à lui seul avoir tous les cadres compétents pour continuer sur la même lancée afin qu’il n’y ait pas réapparition d’autres éléments similaires.
En outre, M. Ndikumana recommande aussi des stratégies conséquentes en amont pour la transparence dans la gestion des fonds collectés surtout au niveau de la gestion des marchés publics, l’enrichissement illicite, et la gestion des deniers publics.
Et de marteler : « Oui pour une bonne collecte des fonds mais à la caisse, il faut une gestion transparente ». Selon lui, il faut éviter que les partis politiques d’origine continuent à être les boucliers protecteurs.
Et de faire observer qu’il y a des gens qui considèrent leurs postes comme un boulevard pour se la couler douce dans la mauvaise gestion. « Il faut sensibiliser les membres des partis politiques à plus de responsabilité », insiste-t-il.
Enfin, le président national de Parcem propose aussi le respect de la loi dans le limogeage, le licenciement de ces agents. Mais, tient-il à nuancer, les démettre de leurs fonctions reste salutaire.
Pour lui, c’est un message fort. Et de renchérir : « Il faut inaugurer une ère nouvelle, suivre cette stratégie globale qui sera mise en place pour bientôt afin que cette lutte intègre beaucoup d’acteurs dans leurs diversités. Le combat est noble, il faut y participer en synergie ».
Par Felix Haburiyakira (Iwacu)