Deuxième jour de visite du Roi au Congo: mémoire et travail de réconciliation au programme
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Au Musée national, au Mémorial aux anciens combattants ou au Palais du peuple, la visite du roi des Belges à Kinshasa est dense mercredi en évocation du passé colonial et du délicat travail de réconciliation entre la Belgique et la République démocratique du Congo.
Le roi Philippe, accompagné de son épouse, la reine Mathilde et de membres du gouvernement belge, dont son chef Alexander De Croo, est arrivé mardi après-midi à Kinshasa, pour une visite officielle prévue sur six jours, à l’invitation du président de la RDC Félix Tshisekedi.
Cette visite est la première depuis celle de son père Albert II en 2010, et revêt une forte portée symbolique. Il y a deux ans, le 30 juin 2020, à l’occasion du 60e anniversaire de l’indépendance de l’ex-Congo belge, le roi Philippe avait exprimé dans une lettre à M. Tshisekedi ses “plus profonds regrets” pour les “blessures” de la colonisation, une première historique.

Il avait alors regretté les “actes de violence et de cruauté” commis à l’époque où son ancêtre Léopold II avait fait du Congo sa propriété personnelle (1885-1908), avant le demi-siècle de présence de l’Etat belge dans l’immense pays d’Afrique centrale.
Certains Congolais, comme le porte-parole du gouvernement, veulent y voir le début d’un “nouveau partenariat”, “décomplexé”, “d’égal à égal”, quand d’autres réclament encore excuses et réparations pour les souffrances endurées et les “pillages” des richesses de la RDC.
La deuxième journée du voyage royal a commencé au Mémorial aux anciens combattants, où le souverain a décerné une décoration au dernier ancien combattant congolais encore en vie de la “Force publique belge” ayant participé à la Seconde Guerre mondiale.

Le caporal Albert Kunyuku, qui vient de fêter ses 100 ans, avait été enrôlé en 1940 et a fait partie du contingent militaire d’appui médical envoyé en Birmanie en 1945. Assis sur une chaise, le vieil homme a longuement serré la main et échangé quelques mots avec le roi penché vers lui.
“Le roi vient de me faire des promesses. C’est très bien. Il faut les matérialiser”, a ensuite déclaré à la presse le caporal Kunyuku.
“Décorer c’est bien. Mais, il faut aussi indemniser les familles de ces anciens combattants qui ont perdu la vie dans une guerre qui ne les concernait pas”, commente dans la rue juste à côté Madeleine Yowa, une infirmière de 43 ans. Marie-Thérèse Bakuku, vendeuse au marché Gambela voisin, parle même d'”hypocrisie” et demande elle aussi des “indemnisations conséquentes” pour leurs descendants. “Ils étaient des milliers, il n’en reste plus qu’un et on tente de sauver les meubles…”, estime cette femme de 73 ans.
Restitution des objets d’art

Le roi devait se rendre ensuite au Musée national de la RDC (MNRDC), un établissement financé par des fonds sud-coréens et inauguré en novembre 2019. Consacré à l’histoire culturelle du pays, il abrite masques, ustensiles, instruments de musique, etc.
Cette visite devrait permettre d’aborder la question de la restitution des objets d’art à l’ex-colonie, pour laquelle le gouvernement belge a défini une feuille de route en 2021.
Après une cérémonie d’accueil au palais de la nation, résidence officielle du président de la RDC, le chef de l’Etat congolais et le roi des Belges se retrouveront sur l’esplanade du Palais du peuple, siège du Parlement.
Le roi Philippe doit y prononcer le premier discours de son voyage.
Le deuxième est prévu lors de l’étape de Lubumbashi (sud-est) de son périple, vendredi devant des étudiants de l’université du chef-lieu du Haut-Katanga, riche région minière.

Le roi se rendra enfin à Bukavu (Sud-Kivu), dans l’est du pays déchiré par près de trois décennies de violences armées.
La relation entre Bruxelles et Kinshasa fut difficile durant la fin de la présidence de Joseph Kabila (2001-2018), critiqué pour s’être maintenu au pouvoir au-delà de son deuxième mandat, et s’est réchauffée depuis l’accession à la présidence de M. Tshisekedi.
Du côté de la Belgique, la réflexion sur le passé colonial s’est accélérée en 2020, dans le sillage du mouvement Black Lives Matter lié au meurtre aux Etats-Unis de l’Afro-américain George Floyd.

RTL